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Le coin des PLP Lettres-Histoire
3 mai 2016

Professeur de tous les langages ?

 

« Merde »,

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« putain », « fait chier », « bordel », « ça me gave », « j'ai les boules »...

A qui n'est-ce jamais arrivé de laisser échapper une grossièreté face à ses élèves ?

Faut-il pour autant en faire un drame ?

En tant que professeur de LP, nous sommes amenés à travailler avec le monde merveilleux de l'adolescence. Monde farci d'un langage familier voire souvent vulgaire, ou « Salut ma connasse ! » est une marque de sympathie le matin à 8h ; ou « ouah tu m'as traitée, fils de pute » est une réponse amicale.

Je ne vais pas ici dresser le portrait peu flatteur du langage de nos bambins, mais je voudrais aborder la question de savoir quel doit être le notre.

Deux options : s'adapter et prendre leurs expressions, les faire notre et les utiliser à l'occasion (ça, ça passe crème), ou s'opposer fermement à cette langue étrange, et imposer une maîtrise parfaite d'un langage courant, sans dérapage, et sans tolérance de dérapage de leur part.

Vous l'avez peut-être compris : je choisis la première option.

Donc, parfois, de façon mesurée et calculée, oui, je dis des gros mots en classe (ouh l'aveu de ouf).

Mais attention, à aucun moment je ne les insulte. Au pire, pour les classes avec lesquelles le contact est facile, je vais utiliser un « patapouf » ou un « pauvre bichette », mais jamais, même si je le pense un « t'es con » ou un « ta gueule ». ne sortira de ma bouche.

Enfin, je dis ça, mais un jour, il y a déjà quelques années, ça m'est arrivé : j'ai dit « ta gueule » à un élève. J'ai culpabilisé immédiatement parce que ça m'avait échappé, me suis bien évidemment excusée tout de suite, et je crois que l'élève a juste compris qu'il m'avait peut-être un peu saoulée. Il n'y a eu ni suite, ni conséquence, peut-être justement parce qu'aussi spontanément que je l'avais insulté, je lui ai demandé pardon et expliqué ma brusquerie.

Non, insulter ces mômes, c'est entrer de trop dans leur fonctionnement, et c'est perdre cette espèce d'aura de la maîtrise de soi qu'ils voient en nous.

Léger bémol : pour les profs d'atelier ou de cuisine, l'insulte fait presque partie de la formation, du coup, le relationnel est différent.

Mais nous, lettres-histoires, nous sommes les professeurs de « tous les langages », alors que l'on nous impose, plus ou moins implicitement de rester dans le courant et le soutenu.

Je trouve ça con. Et j'aime bien, pour qualifier par exemple le méchant d'un roman, dire que c'est un gros bâtard, ou que les nazis étaient des fumiers. Ça fait rire les élèves qui n'ont pas l'habitude de nous voir parler comme ça, et qui nous accordent soudain toute leur attention, et ça casse aussi un peu le mythe du prof irréprochable, jamais une mèche rebelle, qui rougit en entendant dire pute.

Ouais, je peux être vulgaire, je peux même l'être plus que vous, j'ai encore en stock un paquet de mots dégueus, et je vous mets la misère verbale quand je veux.

Ce que l'on doit apprendre aux élèves, c'est qu'il faut maîtriser tous les langages, pour pouvoir aisément passer de l'un à l'autre, ce qui nous donne dans tout contexte social une furieuse capacité d'adaptation. C'est ce qui compte : ils doivent apprendre à passer partout, d'un cocktail chez l'ambassadeur à une soirée entre potes. Nous devons donc, en tant que profs leur montrer que c'est facile d'utiliser des gros mots, mais qu'il doit aussi falloir choisir de s'en servir ou non, et ne pas limiter notre vocabulaire à ça.

Pour cela, rien de tel qu'un petit « merde » à l'occasion.

 

(Source de l'image : http://www.1jour1actu.com/culture/connais-tu-lhistoire-des-gros-mots/)

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  • Aspirant, stagiaire, néotit, ou soldat aguerri de l'Education nationale, chaque PLP s'est senti seul à un moment donné. Les lettres-histoire et les autres verront peut-être ici que chacun a déjà rencontré les mêmes situations, questions et inquiétudes...
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